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mardi 15 avril 2014

Un Québec moderne libre de ses choix. Première partie: ''La fameuse dette du Canada''

Montréal le 15 avril 2014


Un Québec moderne libre de ses choix

La fameuse dette du Canada.

(Première partie)

Nota Bene : Extrait du Livre ‘’Québec Troisième Round’’, (chapitre 4) par Julien Maréchal. Mis à date à partir des sites Internet du Canada, ce chapitre traite de la dette du Canada au mois de novembre 2012, dernière année où les statistiques semblent complètes. La dette du Québec sera l’objet d’une autre étude.

Temps de lecture (approximativement… 13 minutes)

-Combien ça coûte l’Indépendance ?

                                        Marcel Ticlin

-Ben heuuu…c’est en vente cette semaine.

                                        Mâame Chose

Regardons maintenant le cas de la dette canadienne,

À propos de laquelle depuis trente ans on en brandit les chiffres pour nous faire peur. Parce que c’est bien de cela qu’il s’agit chaque fois qu’il est question des finances ou des dettes du Québec et du Canada, de campagnes de peur, d’intimidation.

D’abord, de quoi est faite cette dette canadienne qui avoisine depuis dix ans les 500 milliards de dollars (plus de 650 milliards de prévus pour 2014-16) ? Chiffre pour le moins considérable.

Il est dit et répété depuis bien trop longtemps (bien imprudemment d’ailleurs) que le Québec devenant indépendant devra obligatoirement en assumer une part, soit plus ou moins 23%, ce qui représente sa population dans le Canada actuel.

Je ne partage absolument pas ce point de vue, et je vais vous expliquer pourquoi.

C’est maintenant, du fait de notre présence dans le Canada que cette dette nous pèse. Elle est payée avec nos impôts. En plus de la dette du Gouvernement du Québec.


Sachez tout d’abord si vous l’ignorez, que le Canada ainsi que le Québec (en somme tous les états et tous les gouvernements de la Terre), contractent des emprunts auprès de toutes les institutions financières internationales. Il y en a partout de ces prêteurs-emprunteurs.

Le Québec a déjà sa propre dette, qui est faite des sommes qu’il emprunte aux institutions bancaires internationales. Tout comme le Canada, les États Unis, la France, le Brésil et ainsi de suite. Dans les faits, les emprunts du Canada et du Québec représentent des investissements, pas des créances. Et ne confondons pas les emprunts actuels de pays en faillites comme la Grèce, l’Irlande, bientôt le Portugal et vraisemblablement aussi l’Espagne. Quant à l’Angleterre son cas n’est pas grave, il est seulement désespéré. Pour ce qui est de celui des USA voyez votre quotidien préféré. Ou préférablement les sites Internet qui traitent spécifiquement de la dette américaine.
Réfléchissez quand même qu’un pays ce n’est pas une quelconque entreprise commerciale, susceptible d’être mise en faillite et d’être saisie par des huissiers. Un peu de bon sens quoi. L'histoire nous enseigne qu'un pays, lorsqu'il est déficitaire sur le plan humain ou sur le plan financier, ne peut être saisi que par la force. Donc par un effet de guerre. Mettons qu'entre le Canada et le Québec, ce genre de rapport est totalement inexistant.

Notre capacité de pouvoir au fil des ans emprunter et payer est tributaire de nos moyens. Il existe des agences qui cotent et décotent, selon la santé financière des états, les tarifs de ces emprunts.

Il va de soi que le Canada est lui aussi coté et décoté selon ses politiques, ses revenus, ses actifs, ses capacités de remboursement.


D’autre part, tous les états ont des économies, des épargnes, des placements, des investissements, des portefeuilles d’actions et d’obligations, des fonds non moins considérables, des acquis de toute sorte, des caisses de ceci et cela, qui entrent en jeu lorsqu’il s’agit de mesurer la santé financière des états en cause. Le Canada et le Québec ne font pas qu’emprunter, ils sont également des prêteurs, et jouent le jeu de la finance internationale, dont ils sont des participants et non des moindres. Le bas de laine des Québécois est notoirement bien rembourré. Il serait intéressant de comparer les sommes que le Québec engrange chaque année, versus celles qu'il doit payer au chapitre de sa dette. Quelque chose me dit qu’en fin de compte, soit le Québec est avantagé dans ces tractations financières, soit il arrive égal, ses dépenses étant compensées par ses revenus. 
Soit il est déficitaire. Certainement pas autant qu’on veut bien nous le faire croire. Encore que si on prend en compte les actifs privés du Québec, comme les acquis de ses banques et du Mouvement Desjardins, ainsi que de la Caisse de Dépôts et Placements du Québec, notre dette Québécoise, (et ici je ne nomme même pas tous ces actifs privés que tous les québécois ont sous formes de placements dans d'autres portefeuilles) fait figure de montant, qui sans être insignifiant, n'est pas à proprement parler catastrophique bien au contraire. C'est une sorte d’hypothèque bien modeste, étant donnée la valeur de notre économie et de nos richesses.

Il convient donc de relativiser cette dette qui, en chiffres brutaux semble redoutable, mais moins épeurante qu’on ne le dit, lorsqu’on la considère dans l’ensemble des tractations financières.

Face aux institutions financières le Québec n’est responsable que des emprunts qui portent sa signature. C’est pareil pour l’Ontario (beaucoup plus endetté que ne l'est le Québec) et le Canada.

Que ce dernier se retrouve privé des impôts du quart de sa population, n’empêchera nullement les institutions financières du marché des emprunts, de lui présenter les factures pour ‘’ses’’ engagements. Le Canada a l’obligation devant les marchés financiers de respecter sa signature. 

Le Québec devenant indépendant doit lui aussi respecter sa signature, posée au bas de ses emprunts à lui. Sa position une fois l’indépendance faite, bonifiée par le fait même que son budget va vraisemblablement presque doubler, lui conférera une crédibilité accrue.

Quant au Canada, qui sera alors amputé des quelques 50 milliards de dollars qu'il collecte chaque année sur le territoire québécois, devra composer avec le Québec s’il veut que celui-ci, en bon voisin, lui facilite la tâche. Il faut bien admettre ici, les affaires étant les affaires, que le Québec n’a pas d’obligation contractuelle, et surtout pas morale, envers la dette canadienne.

Il n’est pas automatiquement vrai qu’advenant son indépendance, il doit prendre en charge le quart de la dette canadienne. Ce n’est pas comme cela que les choses vont se passer. Cette dette, aujourd’hui épouvantail à nonos, va devenir au lendemain de l’indépendance, un puissant outil de négociation pour le Québec. Dans la situation qui s’en suivra c’est bel et bien le Canada qui sera le demandeur, pas le Québec.

La dette canadienne est avant toute une affaire canadienne. Certes le Québec dans le Canada a son mot à dire (si peu) sur la manière dont le gouvernement central endette la fédération dont il fait partie, (malgré lui depuis le rapatriement de la constitution au lendemain du référendum de 1980). C’est une toute autre paire de manches à partir du moment où le Québec n’en fait plus partie. Tant et aussi longtemps que le Québec a une représentation à la Chambre des Communes (75 députés actuellement sur 308). Autrement dit le Québec, en tant que membre du Parlement du Canada, a une responsabilité, et surtout un droit de regard dans les affaires canadiennes. Cependant sa puissance au sein de cette assemblée est considérablement limitée du fait de sa représentation.

Comme il ne détient que 25% des sièges il est toujours en minorité, et sa voix ne peut être que celle de la protestation envers des politiques qui le désavantage. Simplement parce que dans le Canada, le Québec est dans l’opposition. Il ne détient jamais le pouvoir. De plus, au fil du temps qui passe, la représentation du Québec dans le Parlement Canadien s’érode du fait que le pourcentage de sa population diminue. Il arrive donc forcément qu’un jour ou l’autre le Québec ayant une population qui grandit moins vite que celle du Canada verra sa députation diminuer, dans une proportion égale, ni plus ni moins que comme une peau de chagrin. 


Pour le moment la loi protège la proportion représentative du Québec au Canada indépendamment des fluctuations de sa population, mais régulièrement, des voix s’élèvent au Canada pour que l’on rogne cette représentation au nom d’un vague principe d’équité. Ainsi le Québec ne peut au fil des années que voir diminuer encore sa représentation déjà fort malmenée à Ottawa depuis 100 ans. Il peut par le jeu des alliances, surtout quand le gouvernement est minoritaire, influer le cours des choses, mais généralement sa force politique se limite à des sparages indignés, des protestations pathétiques, et il doit se contenter de tenir sa place dans d’interminables négociations au sujet de tout, qui n’aboutissent que très rarement, à quoi que ce soit de satisfaisant.
On vogue depuis 100 ans à travers un océan de compromis, de palabres, de réclamations, bref on alimente un contentieux qui n’en finit jamais. Un Québec devenu indépendant n’a plus rien à faire dans ce cirque et n’a d’autres responsabilités que les siennes en tant que pays.

La réorganisation des dettes du Canada ira donc forcément de pair avec le partage de ses actifs.  Il va de soi que si on pose comme postulat que le Québec doit être tenu responsable du quart des engagements du Canada (ce qui reste à démontrer et surtout à négocier) il va sans dire que suivant la même logique, il a d’abord droit au quart de tous ses actifs. Avez-vous seulement une idée de ce que peut représenter la valeur foncière, financière, mobilière et immobilière du Canada ?[1]

Avez-vous la moindre idée de ce que peut être le portefeuille mondial des actifs du Canada ?
Si le Québec acceptait éventuellement de prendre en charge dans un souci de bon voisinage, une partie de la dette canadienne, ce ne sera qu’après que les actifs actuels du Canada auront été mis dans la balance du partage de l’assiette au beurre. Rappelons que le Canada a plus de mille institutions qui brassent de l’argent dans toutes les entreprises et les officines, partout sur la planète où il y a une piastre à faire.


Il est inconcevable qu’un Québec devenu indépendant n’hérite que des passifs du Canada, sans qu’on considère qu’il a également droit à sa part des actifs. C’est là une réalité dont on ne parle pas souvent, mais tout aussi incontournable, et qui pèsera lourd dans les négociations.

Les Canadiens avec la Couronne Canadienne sont les seuls vrais propriétaires du Canada, dont les Québécois font partie. N’en déplaise aux ‘’ceusses’’ qui disent n’importe quoi, rien n’empêchera les Québécois de conserver s’ils le désirent leurs actifs canadiens dans le Canada, et de les gérer au mieux de leurs intérêts. Nous prendrons la dette peut-être, mais dans ce cas nous prendrons aussi les revenus qui vont avec. C’est comme ça et pas autrement. Il est certain que les actifs canadiens qui reviendront de droit aux Québécois après l’indépendance, vont largement dépasser la part de cette dette canadienne qu’on voudrait nous refiler.
D’ailleurs, même si le cas devait se produire, et que le Québec refusait catégoriquement de considérer la dette canadienne, cela ne l’empêcherait pas de continuer d’être le propriétaire légal de tous les actifs canadiens qui lui reviennent. Je le répète ici, c’est le Canada, plus précisément le Gouvernement Fédéral d’Ottawa, qui est signataire de la dette canadienne. Pas le Québec, ni l’Alberta, ni l’Ontario, ni les autres provinces et territoires.

Quant aux Canadiens qui possèdent des actifs au Québec, ils pourront les conserver, les vendre, les échanger que sais-je, selon leurs désirs, comme tous les investisseurs étrangers d’ici et d’ailleurs. Ce sera ‘’bizness as usual’’. Ce sera vrai pour le Gouvernement du Canada, les particuliers et les institutions.

C’est également vrai pour le dollar Canadien…hé oui…c’est comme ça mon bon monsieur ! Une monnaie commune ? Ma foi je n’en sais rien, mais si ça se trouve on l’appellera l’Américo, pour la distinguer de l’Euro. Je n’en ferai pas une jaunisse.[2]

Il n’y a donc pas lieu de brandir ici des menaces, de proférer des inexactitudes sur un ton revendicateur.
Il faut s’entendre, et on va s’entendre. D’autant plus que des dettes si ça coûte des sous, cela en rapporte beaucoup…pour ceux qui les financent.

C’est là une façon de voir plus rassurante parce que plus juste. Je présume que nos gestionnaires financiers qui s’y connaissent en portefeuilles, ici au Québec comme ailleurs, sont et seront en mesure de départager le vrai du faux dans ces poignantes considérations. On demandera aux Fortin, Parizeau et autres Montmarquette ou Lauzon, de nous donner leurs avis sur ces ‘’détails’’. Cependant disons ici qu’il ne faudra pas trop tabler sur ces ‘’spécialistes’’ qui ont tendance à examiner le Monde de la Finance à partir d’une grille et d’un vocabulaire, où le flou le dispute à l’approximation plus ou moins cohérente. Pour le profane ces analyses songées demeurent parfaitement ésotériques (réservées aux initiées).

L’économie du Québec est tissée dans la trame de l’économie mondiale, et notre indépendance aura surtout pour effet de donner à notre voix la place et l’importance qui lui reviennent.
Je pense qu’au-delà des rhétoriques démoralisantes, les voix de la raison sauront se faire entendre. Les milieux financiers internationaux (les premiers intéressés à ce que tout se passe bien) feront comprendre à ceux qui ont la tête trop enflée, qu’ils devront se calmer le poil des jambes.

Quant aux autres avantages de l’indépendance, signalons ici la pleine maîtrise de notre culture, le contrôle sur nos affaires extérieures, dont les pleins pouvoirs sur notre immigration, et la gestion intégrale de nos communications. Fini le CRTC (Conseil de la Radio Télévision Canadienne).

Le quart des investissements canadiens en matière d’ambassades, de consulats, et d’agences à vocation internationales nous reviennent. Ben oui, parce que devenant un pays nous allons bien évidemment nous occuper de nos affaires extérieures. Se pourrait-il qu’après le choc de la séparation le Canada et le Québec acceptent de s’entendre dans ce domaine, et partagent en bons voisins leurs responsabilités ? C’est tout à fait possible. Ce genre d’échanges de bons procédés diplomatiques est largement répandu sur la planète.

Notre langue est notre meilleur atout. Quant à notre capacité de nous débrouiller dans le marché mondial, notre situation me semble bien plus avantageuse que celle du Canada Anglais. Étant donné que depuis toujours les Québécois s’efforcent d’être bilingues (surtout à Montréal) et même de plus en plus trilingues, là où les Anglo-Canadiens ont fait preuve depuis deux siècles, d’une remarquable détermination à ne pas vouloir apprendre au moins le Français, qui est tout de même une des deux langues officielles de leur pays. Mais ça, ce n’est pas notre problème, c’est celui du Canada et des Canadiens.

Devoir se plier aux diktats et aux impératifs du Canada Anglais, sous le prétexte éculé de vieux syndrome de conquête inaboutie. Traîner avec nous un vieux bagage de rancœurs encombrantes dont les composantes ne sont plus de notre époque, tout cela ne représente qu’autant de boulets historiques rouillés, dont nous nous débarrassons maintenant, histoire de progresser. Il y a en effet des chicanes qui ne valent plus la peine d’être faites.

Laissons aux exégètes des temps futurs le soin de démêler l’écheveau compliqué de ces vieilles dérives rancunières, qui n’intéressent plus la jeunesse actuelle, avide de réalisations nouvelles. L’Histoire du passé est utile à la compréhension du présent…à condition d’en sortir.

Je veux bien que nos prédécesseurs aient accomplis des actes, posés des gestes, dont on doit leur être reconnaissants. Avec toutefois une nuance de taille. À savoir que ces gens-là sont morts et enterrés, et que ce qui nous intéresse avant tout, c’est notre situation de vivants actuels.

Ces ancêtres nous ont également légué un héritage défaitiste dont nous n’avons plus à porter le poids. Encore moins de devoir en subir les conséquences néfastes, indéfiniment.
N’en déplaisent aux nationaleux, prompts à monter des barricades sitôt qu’on interroge le passé de façon critique (comme si on profanait un quelconque caractère sacré de la tradition) le passé ne doit pas être sacré. Tous les passés sont douteux, peuvent être remis en question, doivent être démystifiés, sous peine de s’y embourber à mort.

Le passé ne peut pas être notre maître. Il est la somme des essais, des réussites et des erreurs, qui font les pays. On doit constamment en faire le procès. 

Cela étant dit, l’étude du passé est utile pour comprendre le sens de l’évolution de l’humanité, et en tirer des enseignements sans en sanctifier les péripéties.

Considérez la lourde histoire des dieux et demandez-vous si les hommes ont si bien fait d’en traîner les chaînes jusqu’à nos jours ?

L’actualité est remplie des clameurs des suppliciés à ces vieilles traditions, dont il faut se dépêtrer.


Julien Maréchal




[1]  À commencer par la Banque du Canada (ça n'est pas de la p’tite bière): La Banque Fédérale de Développement, la Société Canadienne d’Hypothèques et de Logements, le Fonds du Millénaire, la Caisse de l’Assurance Chômage, les fonds de retraites des associations de fonctionnaires, les fonds de pensions,  dont l'Office d'Investissements de Pensions du Canada, l'O.I.R.P.C. (200 milliards en 2013), et le quart de tous les acquis canadiens ici et à l’étranger. Du gros cash noir à la tonne. Et je ne parle pas des actifs, bâtiments, armée, matériel, investissements, infrastructures, ambassades et placements à l’étranger, ainsi que tous les investissements d’innombrables corporations, la liste exigerait un énorme bottin.


[2] Dollar Québécois versus dollar Canadien ? D’ici vingt ans les deux Amériques auront, à l’instar de l’Europe, une monnaie commune. En attendant on fait des compromis, et on donne de la job aux artisans graveurs.

Un Québec moderne, libre de ses choix. Deuxième partie: Une façon de voir le Monde!


Montréal le 15 avril 2014
Un Québec moderne, libre de ses choix.
Une façon de voir le Monde
(Deuxième partie)
Temps de lecture ( plus ou moins 20 minutes .

Comment le Québec une fois devenu indépendant va-t-il aménager son espace politique, social et économique ?
Tout indique qu’il va continuer à suivre la mouvance générale du progrès à l’occidental.
Il y a dans nos classes politiques des tendances capitalistes de droite (très peu d’extrême-droite) essentiellement libérales, fortement connotées de social-démocratie.
On y trouve une gauche centriste, plus soucieuse de redistribution égalitaire des richesses, des biens et des services, que de faire valoir des remises en questions idéologiques radicales, communistes par exemple. Ou se réclamant d’une dérive anarchisante quelconque.
Je veux ici attirer votre attention sur les changements qui se sont produits dans l’organisation socio-économique planétaire depuis 200 ans. L’état de notre planète s’est extraordinairement modifié entre 1800, 1900,1950, et 2000.
Et quand je parle de modification je fais référence à un passé qui semblait immuable depuis des millénaires, et qui avec le XIXe Siècle prend un virage industriel époustouflant, qui continue encore sur sa lancée depuis 2 siècles.
À un point tel qu’entre ces dates, le Monde change radicalement de visage, et la vitesse de ces changements ne cesse de s’accroître.
L’idée d’une économie de droite, inspirée du modèle capitaliste libéral du XIXe Siècle a elle aussi changée. Le Monde actuel n’est pas unipolaire ou bipolaire, il est multipolaire. Depuis les années 60, les mouvances vertes, altermondialistes, écologiques, alternatives, donnent le ton aux politiques locales et internationales.
La planète est devenue une réalité tangible, et ses habitants prennent conscience de sa fragilité et de son immense valeur. Il est bien évident que les politiques actuelles vont profondément changer dans les années à venir. Il est probable que les vieilles menées arrivistes, basées sur un développement sauvage, vont s’éteindre peu à peu. Le Québec, tout en demeurant attaché à ses valeurs occidentales, pourrait fort bien développer une économie qui romprait avec des dogmes actuels, devenus malsains (indéfendables et dangereux) à force de gaspillages.

Que nous développions ici une société plus détendue, moins trépidante, dans laquelle l’idée d’une liberté individuelle élargie serait élaborée, et reposerait sur d’autres prémices que celles de la dilapidation incessante des richesses naturelles, n’est pas pour me déplaire, bien au contraire.
Au Québec, c’est le centre qui détermine le jeu politique. Plus à droite...plus à gauche, question de couleur du temps. Des mouvements de balancier qui ne vont jamais bien loin vers la droite ou la gauche extrémiste. C’est d’ailleurs ce qui frappe chez les Québécois, ce souci de tranquillité, ce besoin d’espace de réflexion, de méditation dirais-je, qui en font des gens imaginatifs et soucieux de paix. Oui bon c’est un point de vue parmi d’autres, et j’en connais qui déplorent ce coté paisible qui nous singularise.
Ils le confondent par manque de jugement, avec une sorte de faiblesse de caractère, qui n’existe absolument pas ailleurs que dans une certaine littérature.
Véhiculée surtout par la télévision et les médias.[1]
Pas tous, bien évidemment.
D’autant plus que les générations nouvelles semblent plus sûres d’elles que leurs parents. Ce qui ne veut pas dire qu’elles soient automatiquement plus avisées. Restons optimistes, ouverts, et vigilants.
En creusant la psyché des Québécois, on s’aperçoit qu’au fond ils sont tournés vers l’avenir. Ce n’est pas une boutade, c’est un trait culturel passablement généralisé en Occident, ou l’avenir est mis à toutes les sauces autant progressistes que délirantes. Plus que leurs semblables ailleurs, les Québécois ignorent de quoi cet avenir est fait (sinon ils seraient déjà indépendants) mais c’est là leur force il me semble. Cet avenir reste ouvert.

Les Québécois me semblent assez peu conservateurs. C’est qu’au fond, ils se savent riches. Leur pays est immense, bourré de potentiel, de richesses à faire crever d’envie des continents entiers. Pour faire bonne mesure, ils vivent à un peu plus de huit millions dans un espace géographique capable de contenir une bonne dizaine de pays européens. Nous ne parlons pas ici d’un territoire désertique. Les ressources naturelles (comme l’eau, les forêts…pour combien de temps encore?…celles des sous-sols (mines) faunes, flores et potentiels énergétiques) y sont abondantes.
Les Québécois savent cela. Ils savent aussi que leur situation économique, pour enviable qu’elle soit, demeure prisonnière d’un ensemble de facteurs qu’ils ne contrôlent pas. Ils déplorent collectivement qu’elle ne soit pas parmi les premières du Monde, et c’est cela qui les scandalise.  Pourtant malgré les propagandes malsaines qui discréditent si souvent le Québec, en le rabaissant comme étant une sorte de cancre économique au sein de la fédération canadienne, des études plus sérieuses affirment qu'un Québec indépendant se situerait dans les tous premiers 20 meilleurs pays du Monde. J'ai lu quelque part qu'on lui accorderait la 16e place, sur un ensemble de plus de 200. Nous sommes loin ici de ce discours pénible qui tente de le discréditer, auquel top de québécois parfois influents accordent une oreille complaisante ne me demandez pas pourquoi, je pourrais me fâcher.
Un des inconvénients majeur du Québec est que sa classe politique, exception faite de rares cas, en est une de petits gestionnaires frileux, sans envergure, peureux, dévoyés par un immense complexe d’infériorité qui n’a plus sa place. Cette classe politique n’est jamais (ou presque) avant-gardiste.

L’Homo Politicus Québécois type est un ti-clin, une sorte de gérant d’estrade frileux (disons le mot, colonisé) qui obéit à des maîtres (toujours étrangers) gardiens d’une sagesse arrogante, distante, condescendante, qui distribuent les récompenses et les admonestations, ainsi que les punitions aux mauvais comme aux bons élèves. Drame, au Québec il y a beaucoup d’élèves, et peu de maîtres.
Le Québécois moyen est, si je peux m’avancer ici, un être paradoxal qui se sait paradoxal, et qui ne tient pas trop à réduire ses contradictions. C’est très étrange ce sentiment que l’on retrouve chez de nombreux individus, de se sentir plus grands que nature, alors que collectivement on constate un malaise, qui n’est rien d’autre qu’une appréciation de classe, laquelle véhicule un perpétuel sentiment d’abattement qui n’a rien de général. Le Québécois moyen n’est pas celui qu’on nous présente dans les médias. Encore moins dans les feuilletons où là c'est carrément de la satire malfaisante.

Il regarde sa situation économique sur la scène mondiale, prend conscience de sa puissance et de ses possibilités, mais manque de certains leviers susceptibles de lui permettre d’en tirer le meilleur parti possible. On pourrait lui reprocher aussi un manque apparent de détermination, laquelle est tributaire des moyens qui lui font défaut. C’est cela qu’il faut corriger.
Les québécois savent qu’avec leur indépendance (et le plus tôt sera le mieux) il faudra réformer en profondeur tout le système d’éducation actuel, et le désaliéner des impératifs économiques auquel il est assujetti. Pourquoi ? Parce que c’est le contraire qui doit primer. Je m’explique.
Dans un espace économique donné, fortement peuplé (comme l’Europe par exemple) aux richesses naturelles relativement limitées comparativement à d’autres, l’économie fille de l’éducation, prend un caractère distributif, qui cherche à tendre vers une sorte de justice sociale généralisée. De manière à désamorcer les mécontentements, susceptibles de déstabiliser l’ensemble.  On entre ici dans des choix culturels dont l’élaboration remonte à plusieurs siècles. En Europe il y a plus de mille cultures régionales qui s'affrontent sur le champ politique. Cela rend l'exercice social économique très périlleux comme on l'a vu tout au long du XXe Siècle.
C’est là tout l’art de la politique, dont l’exercice au quotidien doit freiner les ambitions délirantes, qui s’expriment partout tout le temps.
Il faut donc chercher à satisfaire les majorités, et savoir contenter des minorités turbulentes, ombrageuses, tout en permettant au temps de gommer les disparités, causes de conflits et de guerres. Ce fut, et c’est encore le cas de l’Europe.
Dans un ensemble économique très riche et très peu peuplé comme le Québec, la priorité doit aller vers le mieux être maximum de tous ses habitants.
Entendons-nous bien, j’ai personnellement une propension à considérer que l’État doit avoir une grande responsabilité dans l’élaboration des conditions du mieux être collectif.  Je ne veux nullement dire ici que l’État doit tout faire. Un État trop interventionniste devient vite tracassier, despotique, et d’autant plus inefficace qu’il est fortement fonctionnarisé.

Le fonctionnaire, dont le travail est essentiel à la bonne gouverne, doit pouvoir agir sans avoir continuellement à remplir toute une paperasse débilitante, qui sape son moral et mine sa crédibilité. Cependant le fonctionnariat est de par sa nature bureaucratique, c’est là son talon d’Achille. Je ne suis absolument pas qualifié pour proposer des remèdes à cet état des choses. Disons simplement ici qu’en matière de bureaucratie, le moins est le meilleur.
Les citoyens, par des regroupements en associations multiples très diversifiées, se doivent de participer activement à l’amélioration de leurs conditions d’existences. Au risque d’émettre des lieux communs, il importe beaucoup qu’un pays fort soit le fait de citoyens responsables. Il y va de leur liberté individuelle. Je devrai souvent revenir sur ce point.

S’il fallait toujours par réflexe conditionné, arrimer toutes les réalités culturelles et économiques d’un Québec souverain, aux impératifs commerciaux et culturels américains ou européens, ce serait une façon certaine de limiter l’épanouissement des québécois. Un État responsable doit protéger, favoriser les manifestations artistiques (au sens très large du mot) qui font qu’une nation se distingue d’une autre. Un pays sans originalité artistique, est un pays sans personnalité. On s’y intéresse peu.

Les états américains au sein des États-Unis par exemple, ont des politiques économiques sociales et culturelles, distinctes de la politique fédérale américaine. On pense à la Californie, plus peuplée que le Canada, qui fait souvent la pluie et le beau temps dans l’opinion américaine. Souvent au grand dam du gouvernement central. Notons toutefois ici que prendre la Californie comme un quelconque exemple serait une grave erreur, la rumeur nous est parvenue que ses finances sont dans un état lamentable qui porte le sombre nom de ruine.

Puisque nous avons l’espace, les voies de communications, des richesses naturelles immenses et accessibles, des sources d’énergies pratiquement inépuisables si elles sont gérées intelligemment, que nous manque-t-il donc pour être à l’avant-garde des nations les plus développées de la planète ?

La réponse est multiple.
Nous n’avons pas la gestion complète, le contrôle quoi…de ces richesses naturelles, qui sont exploitées par des intérêts majoritaires étrangers aux nôtres. Le débat actuel sur le Plan Nord cher à M. Jean Charest alors Premier Ministre Libéral (jusqu’en septembre 2012) illustre bien cette problématique. Les investissements étrangers sont certes une bonne chose, mais seulement dans la mesure où le contrôle des entreprises territoriales n’échappent à notre contrôle. Sinon c’est la porte grande ouverte à un néo-colonialisme, cette fois international. Sentiment d’aliénation qui sape notre fierté, et gruge le sentiment d’appartenance qui fait les peuples forts.
Qu’on me comprenne bien ici. Je ne veux pas laisser entendre que les étrangers, du fait de leur caractère d’étrangers sont nuisibles pour nous, pas du tout !
Point de xénophobie ici, un simple constat. Qu’on retrouve sans complexe dans tous les pays libres.
En prenant le contrôle majoritaire de nos richesses naturelles, en ne permettant jamais qu’elles soient aliénées (par des lois votées en ce sens) nous nous assurons que c’est nous qui en gérons la conservation, faisons les transformations, en ferons la distribution et les échanges avec les autres pays.
C’est très important.

Nous devons composer avec les impératifs d’une économie mondiale dont nous voulons être des acteurs actifs, et non passifs. Nous voulons agir, pas seulement subir.
Il importe beaucoup que nous ayons la pleine maîtrise d’une industrie hautement performante, capable de toutes les audaces innovatrices. Que nous puissions proposer au marché international des produits finis, prêt à être utilisés. Mais je ne pense pas que nous soyons dans l’obligation de concurrencer tout le monde dans tous les domaines.

Je ne pense pas non plus que l’utilisation maximale de nos ressources naturelles, même si cette gestion s’avérait plus responsable qu’elle ne l’est actuellement, soit un pré-requis absolu, afin de défendre ou améliorer notre mode d’existence. Il y a moyen de tirer parti de nos richesses au meilleur profit de tous, sans pour autant continuellement faire pression sur la Nature pour en extraire à tout prix le maximum qu'on en puisse siphonner.

Il serait plus louable et rentable pour nous, de développer des relations d’échanges complémentaires, plutôt que de se colleter interminablement à propos de marchés à conquérir, dans lesquels nous ne pouvons faire mieux que d’autres. Il faut donc distinguer notre marché intérieur du marché mondial. Que l’on produise chez nous tout ce qui nous est possible de produire et qui nous est nécessaire, et que l’on vende et achète ailleurs ce qui peut l’être. Mais faire de la concurrence pour prouver à d’autres que nous sommes meilleurs qu’eux, ma foi, je trouve cela enfantin et infantilisant.
Il faut absolument que nous maîtrisions notre économie, à partir du secteur primaire (l’extraction des matières premières, agriculture, pêcheries, mines et forêts, ressources hydrauliques, gaz, secteur éolien) en passant par le secteur secondaire (la transformation des matières premières en biens) et la gestion des réseaux de distribution partout sur la planète de nos réalisations, en les marquant du sceau de notre personnalité à l’interne comme à l’externe (secteur tertiaire).

Nous aurons impérativement besoin d’une marine marchande de classe mondiale, qu’il faudra créer rapidement. Surtout des navires de moyen tonnage (entre 25 et 50 mille tonnes) plus susceptibles de pénétrer profondément dans les ports intérieurs, et qui se contentent d’infrastructures modestes et de moindres tirants d’eaux. L’avantage étant que nous aurions ainsi accès à beaucoup plus de lieux ailleurs sur la planète. D’autant plus que de tels navires exigent des équipages comparables aux gros. Ce qui permet de créer des classes de marins professionnels qui profiteront de ce développement. Au lieu de devoir en embaucher ailleurs à vil prix, avec tous les risques et les inconvénients que cela comporte.
Il faudra aussi développer à la grandeur du Québec un vrai système ferroviaire moderne (à deux voies minimum) capable de fonctionner efficacement pour les passagers et les marchandises. Corollairement donc, des ports de classe mondiale, là où ils se justifient, sur le pourtour de notre pays-continent. Cela exige une politique d’aménagement du territoire avec de grands travaux permanents, respectueux de l’environnement que seul l’État peut entreprendre. C’est ainsi qu’on fait de l’économie et qu’on crée de la richesse. À ceux qui voudront peureusement nous objecter que tout cela va coûter cher, il faut objecter haut et fort que non, non, et non, cela va au contraire rapporter beaucoup. 

Des emplois, de l’activité économique, de la richesse collective, bref du dépassement de soi. C’est cela la civilisation au sens le plus vigoureux et progressiste du terme. Lâchez-nous les pleutres avec vos viles préoccupations de petits esprits mesquins et renfrognés, aveuglés par la seule perspective du profit comptable.
Quant à l’agriculture, laissée dans un état d’abandon pitoyable depuis trop longtemps, il faut lui redonner toute sa dignité et favoriser l’éclosion de fermes familiales, de petites entreprises de productions locales, qui serviront prioritairement les marchés locaux, et qui auront comme précieux avantage de redonner à toute une jeunesse oisive, l’opportunité de donner plus de sens à son existence.
Je parle ici de petites unités capables de se spécialiser dans les cultures maraîchères, de développer avec un petit cheptel animal une économie de terroir, autrement plus valable que ces grosses unités industrielles qui épuisent nos agriculteurs, les amènent au bord du suicide et tombent continuellement en faillite. Alors qu’elles provoquent des désordres sociaux catastrophiques, quand l’économie mondiale agricole est sous la coupe de grands conglomérats qui, pour un oui ou un non, délocalisent, montent les uns contre les autres, des gens qui sont fait pour s’entendre. 

Les coûts de ces abus ne sont plus à quantifier. On en connaît la dynamique empoisonnée et les conséquences humaines accablantes. En agriculture, de petites bourses locales liées à des réseaux de distribution finement tressés, se chargeront d’écouler les excédents qui ne manqueront pas d’apparaître constamment, au fur et à mesure que les agriculteurs, leurs besoins personnels une fois satisfaits, seront en mesure de produire des surplus de haute qualité. Corollairement il faudra envisager des lois pour forcer les grandes chaînes de distribution, à écouler prioritairement sur leurs tablettes les produits locaux.  Cela se fait grâce à des encouragements fiscaux dont l’efficacité se mesure aux résultats. Ceux qui refuseront de coopérer se verront déclassés par d’autres plus clairvoyants.
Il nous faut une industrie constamment renouvelée, qui laisse une très grande place à l’initiative locale, de manière à pouvoir la moderniser constamment.
Sans dépendre des autres dans la mesure de l’impossible. Il nous faut un puissant secteur de recherche et développement toujours remis à jour.
C’est indispensable à notre réussite collective.
Cette capacité de se réinventer, doit être exportable.
Du moment que nous ne bradons pas nos richesses intellectuelles et nos découvertes technologiques, à des intérêts susceptibles de les utiliser contre nous.

Au besoin, et je vais en étonner plusieurs ici, nous aurions intérêt à forger de toute pièce une machinerie industrielle originale, complémentaire à celle qui existe actuellement dans toutes les usines du Monde.  Qui aurait pour nous l’avantage de n’être utilisable que par nous, ou en faisant appel à nos soins. Qui doit être si performante, qu’elle en devienne embléma-tique. La réputation de patenteux et d’innovateurs des Québécois n’est plus à faire. En somme, nous devrions nous spécialiser dans l’innovation. Domaine dans lequel depuis longtemps les Québécois ont fait leurs preuves.

Pour cela il faut repenser notre éducation nationale et ne pas craindre d’en faire un exemple d’innovation permanente, qui tablerait sur la diversité. [2]
En mettant l’industrie au service de l’éducation, et non pas comme nous le faisons actuellement, en mettant l’éducation au service des impératifs industriels. Il n’y a pas, en termes de civilisation, de finalité industrielle et économique. La production n’est pas un idéal. C’est au mieux, un impératif passager d’organisation sociale.
Ce que nous devons rechercher et trouver, ce sont les moyens d’abaisser considérablement la dépendance de nos citoyens, aux exigences et désirs des industriels et des marchands. Faire de nos commerces intérieur et extérieur, des composantes de notre liberté et de notre fierté collective.
Il faut donc aussi reconsidérer sans craindre d’innover radicalement, le temps de travail et ses lieux. Cela implique forcément de rationaliser les déplacements abusivement énergivores.
Le temps consacré au travail, j’entends celui de l’emploi, de l’entreprise qui vous fourni vos moyens d’existence, a depuis des siècles des composantes  lourdes, de types calamiteuses, sortes de condamnations issues des pensées religieuses antiques qui font de la plupart des humains embrigadés dans la croisade de la production, des forçats assujettis, c’est le cas de la dire, aux impératifs qualifiés abusivement de nécessaires, de cette production. Certes depuis maintenant une centaine d’années, la machine a en grande partie libérée des cohortes entières de travailleurs de l’aspect bête de somme, qui depuis des siècles était la norme en matière de travail.  Toutefois la notion du travail demeure profondément marquée par le discours obligatoire qu’elle postule. On se rappelle de l’invocation divine des anciens âges :
‘’ Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front !’’  Maintenant que la plupart des gens n’ont plus à gérer leurs existences en fonction d’un travail manuel à accomplir, ils passent le gros de leur temps de ‘’travail’’ à accomplir des tâches répétitives, lesquelles ne sont pas valorisantes, dépouillées du sentiment créatif ou d’accomplissement qui donne son sens à tout engagement.

Ainsi les employés d’aujourd’hui sont réduits à des actes répétitifs, fragmentés, vidés de tout apport réalisateur personnel. Pas tous bien sur, mais on peut dire sans être taxé d’exagération que la grande foule des salariés, surtout ceux du secteur tertiaire, celui des services, de l’administration (exemple les bureaux) sont conscients que ce qu’ils font n’a pas de réelle importance ni n’a de quelconque réelle utilité. Ils accomplissent des gestes machinaux que n’importe qui peut faire, et au fur et à mesure que les progrès de l’informatique avanceront, ils seront remplacés par des machines beaucoup plus efficaces, qui n’ont pas de besoins sociaux.

Or la vie en société ne doit pas avoir comme raison d’être, une finalité de production. La vie en société c’est l’existence humaine. Pas la bonne marche des machines, le bien-être des cours de la Bourse, ou la bonne gestion comptable avec ses colonnes de chiffres bien alignés dans des bilans sévères, impitoyables et tyranniques.
C’est le travail qui doit être assujetti aux besoins des humains, être une composante du bonheur de chaque individu. C’est une approche supérieure à celle qui consiste aujourd’hui à imposer aux gens, des façons de travailler qui les contraignent à des horaires inhumains, là où la tâche en plus d’être vide de sens est d’un ennui mortel.  Alors qu’ils sont embrigadés sous peine de périr s’ils refusent le système, dans un mode d’existence vecteur de maladies nerveuses.  Il y a quelque chose d’insensé là-dedans non ? Ce ne sont pas les longueurs des journées passées au bureau ou à l’atelier qui sont inhumaines, mais bel et bien tout ce qui s’y rattache.

Le temps perdu dans les embouteillages chaque matin, chaque soir. Les frais qui s’imposent à toute personne qui veut garder sa job. Le transport en commun, l’automobile, les frais de garderies pour caser les enfants pendant que papa et maman ‘’travaillent’’. Tous les coûts subsidiaires, l’entretien de la cour qu’il faut déneiger, les contraventions. Les repas pris aux restos, les travaux du ménage de la maison qu’il faut déléguer à une agence ou une femme de ménage ou homme d’entretien, bref le temps consacré à l’emploi, à la job, mobilise le temps de vie. Et on constate ces aberrations où l’être humain par essence débrouillard, ne peut plus rien faire par lui-même, et doit à son tour entretenir toute une armée de travailleurs-besogneux qui s’occupent de sa maison, de sa maisonnée à sa place.

Les adolescents sont refoulés (oh pour leur plus grand bien certainement) dans d’innombrables cours de ceci ou cela, danse, sports, chants, chorales, clubs, toutes choses admirables bien évidemment. Mais je ne compte plus le nombre d’enfants dans mon entourage immédiat, qui galèrent du matin au soir dans les autobus scolaires d’abord, puis ensuite tout au long de la semaine avec des horaires si chargés qu’ils en perdent le sommeil. Et la santé.
Chacun de nous comprend plus ou moins confusément qu’il y a quelque chose de tordu au royaume du travail-production. Travailler oui, mais pourquoi faire et dans quel but ? Si on ne se pose pas ces questions-là, si on essaye sempiternellement de s’ajuster à un système qui nous broie, alors quel sens a donc notre existence ?
Oui bien sur, vous diront quelques esprits éclairés et aussi résignés, mais quoi faire alors ? Comme on ne pourra pas changer du jour au lendemain toute la société et ses systèmes de production-consommation, on procédera par étapes, tout comme le XXe Siècle a fait basculer le monde rural et ses bêtes de sommes dans une modernité plus confortable. Chose qui ne s’est pas faite sans peines, les nombreuses guerres sont là pour en témoigner. Il faudra donc changer le Monde certes, mais en tenant compte des erreurs du passé. Comment ?
Ne plus faire ce que nous faisons actuellement, c’est-à-dire forcer les travailleurs à se déplacer jour après jour dans des embouteillages puants et coûteux. Qui nous ruinent en temps de vie aliénante Qui mettent en danger la vie elle-même en salissant tout et tout le monde.
S’ils en ont l’opportunité, nos gens auront mieux à faire avec leurs existences, que de les passer dans des bouchons de circulation et des tours à bureaux. Cela fait maintenant un siècle que ces constats sont dits et redits. Ils semblent coulés dans un discours qui au fond, n’est pas autre chose que l’expression d’une paresse intellectuelle et sociale autrement plus planifiée que fatale.
Genre : ‘’ On sait ben, mais y a rien à faire !’’
Ce n’est pas vrai.
Quand on veut, on peut.
Nous devons passer du XIXe Siècle au XXIe Siècle.
Donc repenser l’éducation, les manières de créer, de produire et de distribuer. Reconsidérer originalement les façons de se déplacer.
Libérer les individus de corvées dévalorisantes, sans les priver de leurs moyens d’existence. Au contraire, les augmenter au fur et à mesure que leur temps de production diminuera. Je suis farouchement partisan d’une politique de mise en place d’un revenu décent garanti[3]

À ce sujet d’une importante qu’il faut souligner, alors que nous voulons instaurer ici au Québec une société avancée, il faut considérer au XXIe Siècle la pauvreté comme étant une maladie sociale à caractère déclaratoire obligatoire, et l’éradiquer comme l’humanité a réussi à éliminer la peste, le choléra (qui vient de réapparaître en Haïti?) la tuberculose qui revient sournoisement alors qu’on la pensait disparue, la petite vérole, et d’autres tourments qui ont affligé les humains depuis la nuit des temps. À ceux qui objecteront qu’il y a toujours eu des pauvres, et qu’il y en aura toujours, on peut et on doit répondre que la pauvreté, avec son cortège de maladies débilitantes (quelles qu’elles soient) et sous quelque forme qu’elle prenne, n’est pas une fatalité continuellement réservée à certaines classes populaires.
Si nous voulons sortir de la dialectique infamante de la lutte des classes, il faut considérer que les moins nantis du futur le plus immédiat, devront avoir toujours l’opportunité de choisir librement leur condition pour des motifs personnels qui les regardent. Non pas de devoir subir un état social dégradant considéré comme étant inhérent à la nature humaine, ce qui est d’ailleurs une fausseté.
La pauvreté, pas plus que la maladie n’est une fatalité. Elle ressort d’une conception totalement dépassée de la condition humaine, qui remonte à une époque où les biens essentiels et le principe de la consommation, relevaient d’un système où la pénurie était la règle.
Aujourd’hui où les populations les plus ’’avancées’’ croulent sous la production de biens et de déchets. Il est inconcevable, inadmissible, qu’il y ait encore des pauvres. La résolution de ce problème est à la portée des gestionnaires lucides, qui savent qu’il est dans l’intérêt d’un pays moderne de ne pas avoir de pauvreté. Source de déséquilibre social, et cause de nombreux maux, dont les coûts sont devenus ingérables. C’est faire une excellente affaire du point de vue strictement productif, que de ne pas avoir de pauvres au sein d’une société avancée digne de ce nom.
Quant à la production de biens et de services, il faut en refondre les dogmes. Je pense que la notion de croissance économique soutenue doit être maintenue, puisque c’est une façon de mesurer le progrès.

Cependant il faut bien admettre que l’idée de consommation pour elle-même, qui est aujourd’hui source de pollution et menace les équilibres naturels, doit être repensée.
Je constate que la notion de développement durable a de plus en plus tendance à s’imposer chez nous.
Reste à discipliner maintenant cette idée plutôt vague, pour en faire un programme économique général souple et généreux, capable de maîtriser les gaspillages et les dégâts. Le pire de tous les gaspillages étant à mon avis ces millions de cerveaux laissés pour compte, et que ne demanderaient pas mieux que d’être utiles s’ils en avaient l’opportunité.
Il faudra bien remplacer par des machines plus aptes à s’occuper de tâches répétitives, tout le travail qui déshonore la condition humaine. Je préfère quant à moi, une société composée d’artisans créateurs disciplinés, à celle de travailleurs employés, exploités, du fait de leurs compétences.
Fuir comme la peste tout système à tendance utopique, visant à fondre l’activité économique de secteurs entiers, dans des moules convenus d’avance.
Tous les taylorismes sont à bannir. Bons pour des machines.
Éviter les bouleversements radicaux, en se donnant le temps (au moins une génération) pour ajuster constamment notre société aux impératifs des lendemains qui se font tous les jours.
Depuis des années qu’on insiste ici et là pour que les décideurs développent une vision de développement plus durable (qui s'appuie sur une philosophie dite de moyen terme) plutôt que de jouer les apprentis sorciers qui ne font que réagir aux événements au lieu d’essayer de les anticiper.
C’est très difficile à faire et d’autant plus nécessaire. Contrairement à une idée elle aussi trop répandue, les visions à très long terme, pour utiles qu’elles soient, lorsqu’elles s’avisent de proposer des démarches elles aussi dogmatiques, ont pour effet négatif d’enfermer des générations entières dans des programmes de développement qui deviennent d’autant plus contraignants, qu’ils durent plus longtemps. Quand on y réfléchit, ce qui discrédite les visions à très long terme (pas toutes bien sur) est leur caractère foncièrement utopique. 

Au fond l’existence humaine ne dépassant guère un siècle, alors que la vie productive d’un individu ne va pas au-delà de 50 ans, on devrait éviter de mettre en place, des systèmes à prétentions immortelles.
Investir dans le développement des sciences et technologies spatiales, les satellites et les navettes, les plateformes génératrices d’énergies solaires en orbite, et le transport par micro-ondes de cette même énergie. Directement de l’Espace à chaque maison ou blocs de maisons.
La production d’énergies de toutes sortes, c’est notre affaire depuis toujours. Quand on a dans ses murs des créateurs comme Pierre Couture, inventeur entre autre du moteur-roue, on le traite avec tous les égards dus à son génie, et chapeau bas.[4]

Faire de l’économie avec beaucoup de souplesse, loin des diktats des faiseurs de systèmes. Au fond les changements doivent être mis en place au fur et à mesure qu’ils font la preuve de leur aptitude à faire progresser le pays. Le meilleur système de production et de gestion, s’il ne tient pas compte du facteur humain, devient vite l’ennemi du bien commun.
Or ce à quoi toute société humaine moderne aspire, selon le sens le plus actuel qu’on puisse donner au mot moderne (qui veut dire être de son temps) est la recherche du bien commun. Duquel découle le bien individuel.
Le progrès qui ne se mesure qu’en dérives comptables, est une sottise d’un autre âge qui a mille fois fait la preuve qu’il ne fonctionne plus, du moins à partir de ses présupposés. Force nous est de constater que les bilans comptables engendrent inévitablement des dérives malsaines qui alimentent le cynisme général, lorsque derrière ces bilans gestionnaires qui n’en sont pas, se profilent d’interminables lignées de fripons, de coquins et de voleurs, qui prélèvent leur part, innommable autrement qu’en termes hautement réprobateurs.
On ne compte plus partout dans le Monde ces cohortes de filous qui détournent les fond publics, rançonnent les contribuables, grèvent tous les budgets de leurs actions parasitaires, et pour quoi faire ? Pour s’acheter plus de biens consommables, jouir de plus de femmes (ou d’hommes) bref de briller des mille feux du clinquant, de la pacotille de luxe, alors qu’ils mangent à toutes les gamelles, motivés qu’ils sont par des appétits déréglés.
Ailleurs pendant que ces dérives exaspèrent tous les individus soucieux de faire avancer les choses et faire évoluer l’Humanité, le vrai ‘’Progrès’’ celui qui constitue l’amélioration des conditions d’existences de peuples entiers, attend constamment.
Pour mesurer ce progrès il faut se fier aux mouvements internes des sociétés, là où se font les débats cruciaux d’essence culturelle. Ceux qui déterminent avec les jeux politiques et sociaux, donc philosophiques, les tendances et les mouvances qui qualifient et quantifient les avancements dans tous les lieux de l’activité humaine. Encourager partout l’initiative.
Ne levez pas le nez pas sur les rêveurs, ils sont nos meilleurs porte-paroles. Ce sont les garants de notre avenir prochain le mieux compris. Lorsque vous entendez un conférencier quelconque insérer dans son discours qu’il ne rêve pas en couleurs, vous devez prendre la porte et le planter là. C’est tout ce qu’il mérite. S’il prétend ainsi faire acte de lucidité en laissant sous entendre que les gens ayant les pieds sur terre ne rêvent pas, c’est que c’est un imbécile.

D’autre part, s’il veut dire par là qu’il rêve parfois, en ayant l’air de s’en excuser, il a au moins le mérite de ne rêver qu’en noir et blanc (puisque rêver en couleur constitue pour lui une sorte de tare) avec des teintes de gris, et alors il proclame à son entourage qu’il est un handicapé de l’esprit.
Il souffre d’une maladie qui lui interdit de voir le Monde en couleurs comme toute personne normalement constituée. On ne peut donc tabler sur un tel estropié pour nous expliquer de quoi devrait être fait le Monde. À titre de malade il a droit à notre compassion. C’est un excellent motif pour ne pas en faire un prophète, surtout s’il ne sait pas lui-même à quel point il est malade.
Le Monde dans lequel nous vivons actuellement n’a presque plus rien à voir en fait d’organisation sociale, avec celui d’il y à peine 100 ans. Il est le résultat confondant de rêves parfois farfelus ou délirants, mais plus souvent marqués du sceau de la générosité, qui au fil des décennies en ont changé la face. Pourquoi devrions-nous arrêter maintenant ?
Pourquoi devrions-nous d’autre nous essouffler, nous stresser au mépris de nos existences, dans des voies de développement dont nous savons qu’elles sont néfastes ?
Puisque je suis également poète à mes heures, je vous dirai que nous devons nous engager dans de nouveaux tracés, plus paisibles, plus respectueux de l’écologie, et qui sont l’avenir. Là où ces chemins prometteurs n’existent pas encore, traçons-les.
N’avons-nous pas assez de ces enragés qui triment comme des possédés et s’éclatent comme des malades ?
Si vous en doutez allez faire un tour dans nos hôpitaux, visitez nos cliniques, et jetez un œil sur les dépotoirs…édifiant non ?

Demandez-vous chaque jour si l’existence que vous vivez est bien celle que vous voulez. L’exercice vaut la peine d’être fait. Il est facile de vilipender la classe politique, trop souvent affairiste il est vrai. Il est bien plus difficile (et autrement plus valorisant) de se mêler de ce qui nous regarde tous. Nous avons les politiciens que nous méritons. S’ils nous dégoûtent, à qui la faute ?
Il n’y a pas d’obligation à faire de l’action politique, il faut en avoir le goût et les moyens. Cependant il faut s’intéresser à la politique, et être conscient qu’en définitive ce sont nos existences qui sont en jeu lorsqu’on parle de politique. C’est notre vie de tous les jours qui est en cause chaque fois qu’une loi est votée. Si vous ne vous intéressez pas à la politique, vous pouvez agir dans une organisation à caractère social. L’idée chère à Buckminster Fuller qu’il faut penser globalement et agir localement est la plus intelligente qui soit. Pourquoi s’en priver ?
Qui nous en empêche ?
Au Québec nous avons quelques dictons spécifiques dont celui-ci :
‘’Organisons-nous d’abord, nous les organiserons ensuite’’. C’est à la fois cynique et rigolo. C’est un exemple choisi de volonté d’être sérieux sans se prendre au sérieux, c’est très sain.
Julien Maréchal


[1] Au risque de choquer, je pense plus précisément ici aux feuilletons télévisuels, qui sont fortement enclins à décrire les québécois comme des gens chargés de lourds problèmes psychologiques. Des gens troubles, épuisés, peureux, faibles, toujours au bord de l’écroulement. Aux prises avec des quotidiens de bureaux navrants. C’est un univers de 9 à 5 pathétique et infantilisé, assez déprimant.
[2] Il y aurait beaucoup à dire sur cette tendance lourde à vouloir fondre l’humanité dans un modèle unique. J’ai toujours pensé que la diversité était une notion supérieure. La nature semble être de mon avis.
[3] Cette mouvance sociale s’attarde aujourd’hui au concept de revenu minimum garanti, Les mots étant ce qu’ils sont, je change le mot minimum, concept médiocre, pour celui de décent. Beaucoup plus approprié à la dignité humaine. En attendant encore mieux.
[4] La mésaventure de Pierre Couture et de son moteur roue, immense avancée technologique, est à mon avis le pire scandale Recherche et Développement des 60 dernières années. Elle illustre éloquemment la distance qui sépare les vrais créateurs des gestionnaires imbéciles. Cette affaire n’est pas terminée puisque toute la lumière reste à faire à son sujet. Il y va de l’avenir immédiat de toute l’humanité.